P1100114

Joseph Léon et moi c’est une longue histoire. Ou plutôt devrais-je dire une histoire entre la musique de Joseph Léon et moi. Qui, écouté une fois, ne m’a plus jamais lâché.  Déjà, il fut une surprenante découverte en 2009,  à l’Alhambra, en première partie de Hugh Coltman. Seul en scène, un peu gauche et maladroit avec sa setlist dans une main et sa guitare acoustique dans l’autre. A l’inverse de sa présence anti-charismatique, il m’a bluffé avec un univers folk intimiste et authentique comme personne, des accords simples mais efficaces et des mélodies taillées sur mesure tel un orfèvre. A la sortie de son superbe premier album « Hard as Love » (Diesel/Harmonia Mundi), Joseph Léon est encensé par la critique : du mythique magazine Les Inrocks (classé dans les 100 meilleurs albums de 2009 !) au  magazine intello Télérama, en passant les magazines féminins (DS) qui décrivent un Joseph Léon « inspiré » tel «  un songwriter de haute volée … de première catégorie » « Le Roi Léon » est un artiste «  insoumis ». 

Ex-juriste, qui a goûté un temps au marketing, Joseph Léon a bien fait (pour nous) de suivre envers et contre tout son instinct de musicien autodidacte, pour qui la musique est une compagne, la sienne, où il met toutes ses tripes de producteur, ses excès d’artiste perfectionniste assumés, où il courbe l’échine au sens propre comme au figuré, pour en exhaler des chansons émotionnelles, presque essentielles musicalement parlant, dont on respire le parfum avec volupté et révérence. 

Leon smoking

Il a écumé les petites ou les grandes salles parisiennes en guitare/voix, en mode économique comme il le dit (en première partie d’artistes comme Vincent Delerm, Pascale Picard Band  ou Pauline Croze), jusqu’à ce petit Festival « Hours » au Café de la Danse, entouré de musiciens, qui lui a rendu justice. Pour me rendre compte que ce chemin tortueux et chaotique pour l’entendre en Live était à l’image de cet artiste atypique mais attachant. A la fois mystérieux et discret sur sa personne, ce trentenaire d’origine libanaise qui vit à Paris a fait des choix, pour la plupart terribles, qui ont longtemps dicté sa  route. Pendant plus de 4 ans, la route fût difficile et sinueuse, partant d’un long et douloureux  gouffre intime, vers un chemin personnel un peu plus lumineux et une (belle et) attendue rédemption musicale avec ce nouvel album. 

Bare awakening

Ce 6 mai 2013, la salle "Les 3 Baudets", petite salle parisienne mais grande par son histoire, bien connue sur l’Avenue de Clichy, donne l’occasion de faire la part belle aux découvertes de jeunes groupes émergents (ou en dévleoppement si on veut). Le concert de Joseph Léon était précédé par celui d'un jeune artiste du nom d’Art Alexander, et d’un groupe venu du Sud-Est de la France, Alexis and the Brainbow. 

La salle des 3 Baudets n’est pas tout à fait remplie, mais le public présent est attentif et accorde une attention discrète mais enthousiaste à la musique d’Art Alexander. Il chante en Anglais, et  il officie derrière son clavier, accompagné d’une rythmique reliée à son ordinateur. Art Alexander n’a pas une voix désagréable, bien au contraire, mais on sent une certaine timidité mêlée de trac qui s’entend quand il interprète ses compositions. Le son procuré par son Korg dénote un univers qui n’est pas sans rappeler par certains côtés celui de Woodkid, oscillant entre une pop légère, une pointe de musique classique et un univers electro savamment orchestré et assumé. Il pose sa voix, qui se mixe, se transforme et se fond dans la sonorité particulière de son Korg. Il n’a eu qu’une trentaine de minutes pour nous convaincre et s’exprimer, ce qui est assez frustrant, mais qui donne pourtant l’envie d’en savoir un peu plus sur ce jeune artiste atypique.

Retrouvez les photos du concert d'Art Alexander sur ce DIAPORAMA.

art alexander

Il est actuellement en concert à Paris, le 30 mai au Chat Noir, le 1er juin à l’International, le 26 juin au Gambetta Club. Art Alexander a été sélectionné pour les auditions IDF des Inrocks Lab.

Site Officiel : www.art-alexander.fr/ 
Facebook : www.facebook.com/artalexandermusic 
Page les Inrocks : www.lesinrocks.com/lesinrockslab/artistes/artalexander/ 
 
C’est maintenant au tour d’Alexis and the Brainbow d’entrer en scène. Comme pour le précédent artiste, c’est également LA très bonne découverte de la soirée. Autant vous le dire de suite, j’ai pris une belle et bonne claque de la part de ces cinq musiciens en provenance de Lyon : Alexis Delekta au chant, Gilles Davenport à la guitare et aux chœurs, Côme Saint-Genis aux claviers, Timothée Nicolas  à la guitare basse et aux chœurs, et Lucien Chatin à la batterie. Le groupe Alexis and the Brainbow envoie une très très bonne musique pop enlevée, délurée, électrisante, déjà bien mature qui vous secoue bien les oreilles (découvrir leur vidéo A young gun au Marché Gare ICI) . Le charismatique chanteur Alexis Delekta, vous cloue le bec du début jusqu’à la fin du set avec une superbe voix tout en intensité échevelée. C’est simple, sans même connaître leurs compositions, on a envie de chanter leurs chansons à tue-tête (mais le public des 3 Baudets semble aussi frileux que le groupe Lyonnais est chaud bouillant sur scène), de bouger son corps et surtout, et c’est bon signe, les mélodies vous restent bien accrochées en tête. L’héritage de groupes tels que MGMT ou les Talking Head ne semblent pas très loin. A l’image du titre « A young gun » qui a des allures de hit single à venir, on en redemande bien volontiers ! Un groupe talentueux à suivre de très près …

P1100009

Le groupe  participe actuellement aux Inrocks Lab Sud-Est (vous pouvez voter pour eux sur le lien des Inrocks). Retrouvez les photos du concert d'Alexis and the Brainbow aux 3 Baudets sur ce DIAPORAMA.

Plus d'infos sur Alexis and the Brainbow sur ces liens : 

Site Officiel : www.alexisandthebrainbow.com/ 
Facebook : www.facebook.com/pages/Alexis-and-the-Brainbow/ 
Soundcloud : soundcloud.com/alexis-and-the-brainbow 
Page les Inrocks Labwww.lesinrocks.com/lesinrockslab/artistes/alexisandthebrainbow/

P1100127

A l’aube de la sortie imminente de l’opus  « The Bare Awakening » prévu pour la rentrée prochaine, il aura fallu patienter quatre longues années, se contenter de rares performances parisiennes (à revoir par ICI), pour enfin écouter les titres de son second bébé musical sur la scène des 3 Baudets. L’occasion de vérifier si Joseph Léon s’en est sorti des stigmates Folk et des limbes Peace & Love du premier album et allait nous proposer une musique différente, plus musclée, moins lisse et dépossédée des ombres de Nick Drake et de Bob Dylan. 

Dans une lumière violette, en contre lumière, Joseph Léon et ses musiciens s’avancent doucement sur la scène. Dans un effet de flash back, Joseph Léon s’y prend à l’envers. En introduction à ce concert, il remercie la salle des 3 Baudets de l’avoir invité et nous présente ses musiciens : Lucas Gillet (Claviers), Mathias Durand (Guitare, chœurs), Adrien Touraine (Contrebasse), Nicolas Mathuriau (Batterie). Le public applaudit déjà et on sait que les personnes présentes l’attendent avec impatience. 

P1100133

Avec le premier titre « Let me out », Joseph Léon annonce d’ores et déjà la couleur. Cette composition aux accents psychédéliques nous envoie directement dans un trip musical revival seventies.. Let me breathe. Exactement. La voix de Joseph Léon peu assurée aux premiers couplets, prend alors son envol et de l’aisance au fil de la chanson. Baignant dans une lumière orangée et bleutée, les guitares électrisantes de Mathias Durand et de Joseph Léon, ainsi que la batterie sont littéralement tripantes et chatoyantes. Dans une ambiance digne de Procol Harum, la voix de Joseph Léon s’envole et nous tire vers le haut. Je ferme les yeux. J’y suis. Autant dire de suite que ce « Let me out » fait tellement décoller le public, qu’il est hypnotisé. Je suis tellement saisie  que j’ai peine à redescendre à la fin du titre. Il n’aura même pas fallu une chanson pour que l’on rentre de plain-pied dans l’univers « Bare Awakening » du sieur Léon ! 

Avec la seconde chanson, « Search you will find », on descend un peu d’un cran. Mais pas plus. On reste toujours dans un univers musical, qui explore la douleur, comme si Joseph Léon nous demandait d’être les silencieux observateurs du spectacle effarant d’une  folie collective. La posture de Joseph Léon sur scène est bien différente de ce que j’ai connu. Il parait moins gauche, plus sûr de lui,  il a des regards complices et des échanges non verbaux avec ses musiciens qui ne trompent pas, en particulier avec Mathias Durand. On remarque  à l’évidence que d'une main Joseph Léon tient à maîtriser les sonorités qu’il nous invite à écouter (et non à entendre) ce soir aux 3 Baudets. Joseph Léon est également disert. Et énigmatique lorsqu’il décrit la prochaine chanson à venir « God’s forgotten daughter ». 

P1100180

Gros claquement de baguettes, guitare électrique sur l’épaule, cette fois-ci, Joseph Léon nous fait entrer dans son concert avec ce titre absolument magnifique. Tout y est : on glisse vers les profondeurs d’une âme esseulée, portée par des harmoniques de toute beauté, qui progressent jusqu’au solo paroxystique de Mathias Durand aux accents typiquement hendrixiens. C’est un voyage tellement vibrant et pétri d’émotions toutes plus fortes les unes que les autres, que j’en reste sans voix. Joseph Léon évoque un personnage féminin avec toute l’ambiguïté qu’il faut pour deviner qu’il s’agit d’une blessure intime qui parle de la dépendance aux psychotropes. She takes care, anytime, anywhere. Qui me fait penser à cette phrase qu’il a dite en interview « Il y a un sentiment personnel à la base de la chanson, en ça oui, elle est autobiographique ». 

Jusque-là, Joseph Léon nous a conduit dans une ambiance musicale revival 70’s. On change maintenant de braquet. Toujours avec un personnage féminin, Joseph Léon nous interprète avec « My crazy valentine » une ballade à la fois plus mélancolique et sombre, accompagné par la magie du clavier de Lucas Gillet. Le silence est quasi-religieux dans la salle. De la même manière, avec la chanson « A good time to pray », Joseph Léon sait trouver, non seulement la musique, mais aussi les mots justes et mystiques pour parler de la douleur et la perte d’un être cher.  Je comprends alors, que ces nouvelles chansons sont comme une prise de conscience personnelle (un peu plus poussée que celles du premier album), qui pourtant reste au bord du précipice, avec la pudeur qui lui est propre, comme autant de confessions intimes d’un homme qui a vécu et (j'espère) digéré des situations destructrices émotionnellement parlant. 

P1100194

On se calme. Et on revient à un mode plus léger avec les titres « Stupid tears » et « Sophie’s tune » qui oscillent entre une pop-country décalée et des sonorités à la Beach Boys. On remonte un peu à la surface et on se met volontiers à bouger les pieds et les mains, ce que le public ne se prive pas de faire. Avec ces compositions, Joseph Léon revient à ses premières amours américaines, sa fascination pour l’empire américain et du Grand Ouest. 

Ultime coup de cœur avec la chanson « The Bare Awakening », dont il a tiré le titre de son prochain album. On arrive enfin à ce que j’écrivais au tout début de cette chronique : Joseph Léon nous propose  une musique différente, plus aboutie, plus mûrie par le temps et les expériences, moins lisse et dépossédée des ombres Folk de Nick Drake et de Bob Dylan du premier album. Il assume encore plus pleinement l’héritage d’une musique anglo-saxonne post seventies décomplexée, plus proche de l’univers hendrixien, avec une exigence artistique méticuleuse, généreuse voire même sensuelle. On y découvre des arrangements frémissants, de toute beauté, qui habillent les intentions contenues, mais jamais mièvres des mots de Joseph Léon. Un déploiement de nuances musicales éclatantes et électriques, qui vous prennent de façon totalement vertigineuse. 

Je reconnais avec bonheur les premières notes de « Mother Earth » (que j’appelais auparavant Paradise) qui est  une très jolie ballade dédiée sans équivoque à la mise à sac de la planète par une humanité sans cœur ni  raison. Open your eyes, open your mind, it’s paradise. Le discours de Joseph Léon est volontiers écologique sans être démagogique ni moralisateur. En terme de ballade, celle qui suit « Love Fiction N° 7 » n’est pas mal non plus.  Mode détente façon Hawaï, ses cocktails et ses cocotiers avec une pointe d’humour assurés.  Joseph Léon n’en oublie pas d’être à l’écoute de son public entre les chansons et l’accordage des guitares, en délivrant son humour habituel bienveillant toujours et un poil sarcastique parfois. On approche doucement mais sûrement de la fin du concert. Le temps de découvrir la composition la plus pop de la soirée « One for the money ». avec une pointe de rhythm’n’blues et de soul et des allures de single en puissance. Le seul titre que je trouve le moins Léonien. 

P1100136

Rien de mieux que de terminer sur une composition que tout le monde connaît, qui est une de mes favorites qui plus est, « The Holiday song ». It’s all so quiet. I’ll be yours. You’ll be mine as  long as time goes by. I’m taking in easy. Moving slowly.  Just you on my mind. Les paroles et la musique sont des invitations au voyage intérieur, un départ immédiat vers la zénitude et la relaxation, histoire de déconnecter tout le public de la salle des 3 Baudets. Ce que Joseph Léon a parfaitement réussi ce soir.  Il est toujours et plus que jamais, le Roi Léon, qui mérite  sans conteste le titre de singer/songwriter le plus talentueux de sa génération. 

Malgré une douzaine de nouveaux titres interprétés, tous aussi sublimés par les musiciens que par la voix résonnante de Joseph Léon, je sors de cette soirée avec un goût de trop peu. Je serai volontiers resté à écouter d’autres chansons de Joseph Léon. Une prochaine fois à coup sûr, et le plus rapidement, si possible (avis aux tourneurs et programmateurs de salles). Pour conclure, j’emprunterai ici le texte de Richard ROBERT « Avec The Bare Awakening, Joseph Léon se présente nu et vulnérable, ouvert sur le monde et la société et avance avec la détermination de celui qui ne craint en rien de se confronter au labeur comme au bonheur d’exister ».

Setlist
1. Let me out
2 .Search you will find
3. God’s forgotten daughter
4. My crazy Valentine
5. Stupid tears
6. The Bare Awakening
7. Mother Earth
8. Love Fiction N° 7
9. A good time to pray
10. Sophie’s tune
11. One for the money
12. The  Holiday song

L'album The Bare Awakening est à paraître en Septembre 2013. Retrouver les photos du concert sur ce diaporama >> Joseph Léon aux 3 Baudets

Plus d'infos et dates de concerts à venir de Joseph Léon sur ces liens :
Sur Myspace : www.myspace.com/josephleon
Sur Facebook : Groupe Joseph Leon music
Sur Deezer : www.deezer.com/artist/157857
Retour à l'accueil